Échangeur de Beauzelle

RD 902 – Haute Garonne – 2005

Page Spéciale paroi étanche  au coulis (PAC) :

Cette page est consacrée uniquement  à la technique de la paroi étanche , et non à la totalité des travaux de l’échangeur .

Le pourquoi et  le comment :

A Beauzelle, si vous devez creuser pour réaliser votre route, vous atteignez rapidement la nappe phréatique, ce qui va nécessiter un pompage permanent. En plus des eaux de pluie, vous devez ajouter l’eau de la nappe. Très coûteux et non conforme à la loi sur l’eau ; en effet le pompage permanent crée  un immense « rabattement de nappe » (diminution du niveau de la nappe).

Quel est le principe de la paroi étanche au coulis ?

L’une des couches du sol toulousain est très étanche, car constituée de molasse compacte ( un amalgame d’argile, de galets) . Donc, il s’agit de créer une enceinte circulaire étanche en creusant dans le sol un mur de coulis de ciment et de bentonite, souple, autocicatrisant et bien ancré à sa base dans la molasse.

Les murettes guide :

Pour creuser dans le sol, il faut guider la foration de la paroi en créant deux murettes enterrées en béton armé. C’est ce que l’on voit sur cette photo. Chaque tronçon, chaque alignement droit se recoupent pour assurer une étanchéité parfaite entre les panneaux. Ces murettes seront ensuite arrachées car inutiles à l’ouvrage.

L’espacement est plus large de quelques centimètres que la largeur du godet ou de la benne. Enfin, le coulis étant un produit très liquide, et il faut donc que les murettes soient …. horizontales  !!!!

La centrale de fabrication de coulis :

Le coulis est à base de ciment spécifique pour travaux de fondation, le LP01 fabriqué à partir de laitier de haut fourneau. Ce ciment fait prise lentement et donc accepte quelques mouvements lors des terrassements avoisinants. Il est également peu sensible aux eaux de nappes phréatiques. Pour stabiliser le coulis, mélange de ciment et d’eau, il est ajouté de la bentonite, argile très fine qui rend le coulis homogène, et thixotropique.

La propriété thixothropique est très importante. Le coulis se fige dès qu’il n’est pas en mouvement, et devient liquide dès qu’il est agité. Cela maintient les parois de la tranchée quand la benne a fini de creuser une zone et permet de creuser une autre zone .

La formule : 150 kg de LP01, 30 KG de bentonite et 940 kg d’eau pour 1000 litres de coulis. La centrale est constituée de 3 silos (1 bentonite + 2 de ciment), de deux malaxeurs (cuves blanches au centre) et d’une cuve tampon (à droite). Le coulis est régulièrement testé, tests qui feront l’objet d’un chapitre ci-dessous.

Le creusement :

Le creusement est réalisé en première phase par une pelle hydraulique avec un godet profond. Le niveau atteint est de 3 mètres environ. Pour éviter que les deux parois du murette ne s’effondrent, le creusement s’effectue avec la tranchée remplie de coulis. Il y a peu de perte de coulis, le déblai se mélange peu avec ce coulis et il faut seulement attendre quelques secondes pour vider le godet des excédents de coulis.

Puis intervient la pelle à câbles. La benne que l’on voit en action, pèse 7 tonnes. Deux câbles seulement pour la commander :

  • un câble porteur,
  • un câble pour fermer le godet.

C’est le poids du godet, et ses dents qui grignotent le terrain.

La benne, pour éviter qu’elle ne tourne et vrille en permanence, est équipée d’un câble torsadé à gauche et à droite !!! La pelle est une RB, matériel anglais avec une benne DOMINE. 61 tonnes à vide, 68 tonnes avec le godet … aux mains et aux pieds d’un expert habile.

La géologie  :

Il arrive très souvent que quelques surprises viennent troubler la monotonie de ce type de travaux. Ainsi, nous avons trouvé du sable, du sable et du sable jusqu’à 12 mètres 50 de profondeur au lieu des 6,85 mètres théoriques.

Autre surprise, les bancs de molasses étaient tellement indurés qu’il a fallu trépanner . Sur la photo, la benne à câble est posée à côté de la pelle. La pelle alors soulève à un mètre de haut, un trépan de 5 tonnes et de 500 mm de diamètre qu’il lâche, re-lâche encore et encore sur la partie à trépanner. C’est long, fastidieux, et nécessite encore de retirer les blocs en retravaillant avec la benne.

Les traversées de paroi :

Cette belle enceinte étanche est traversée par plusieurs conduites. Il s’agit des conduites :

  • des ouvrages de rétablissement de nappe,
  • des réseaux d’eaux pluviales de chaussées,
  • et aussi, de deux conduites en diamètre 2000 mm qui constituent le siphon par lequel transite le ruisseau du Garossos, celui là même que nous avions déjà traité pour la RD1 de Blagnac (Voir la page RD1).

Chaque traversée sera traitée par un système approprié qui limitera au maximun les fuites d’eau qui passeraient dans cette enceinte. En effet, un débit de fuite de 1,5 M3 par heure est admis, ce qui est très faible vu la surface de cet enclos.

Ici, sur la photo est montré le dispositif imaginé par l’entreprise qui réalisera plus tard  le siphon : un palplanche métallique, équipé d’une bande de caoutchouc noyée dans le coulis (à droite). Lors du creusement de la tranchée à gauche de ce dispositif, un mur en béton reliera les deux côtés de la paroi étanche non réalisée. Sur chaque profilé, en attente,  il sera monté une autre bande de caoutchouc qui sera noyée …. dans le béton. Ainsi, lors du retrait naturel du béton, l’étanchéité sera conservée.

Les caractéristiques principales : Longueur de la paroi = 700 mètres – surface de l’enclos étanche = 20 000m² – Profondeur moyenne = 7,5 mètres – Profondeur mini = 6,85 et maxi 12,50 m – Volume de coulis = 3 700 m3 – Ciment consommé = 600 tonnes

Délai : démarrage du creusement 10 août 2005 – Fin 20 septembre 2005

Le coulis de paroi étanche –  les essais

Un nombre d’essais important rythme la journée et casse la monotonie. Il y  a trois essais de base (viscosité, densité, exsudation) que nous pratiquons plusieurs fois par jour sur le coulis fabriqué en centrale et deux essais pratiqués une fois par semaine  : 

  • la constitution d’éprouvettes pour tester la résistance du coulis,
  • la réalisation de 3 essais avec le coulis prélevé au fond de la paroi pour mesurer  la densité, la résistance et la détermination du filtrat.

Ci dessous, vous trouverez les photos de ces essais et quelques explications.

Détermination de la densité :

Une balance spéciale est utilisée. Il faut remplir la petite cuve à gauche, mettre le couvercle, puis poser la balance sur son support. La lecture est instantanée.

La densité recherchée ici est de 1,11.

La viscosité du coulis :

Il s’agit de remplir le cône à un niveau déterminé. La sortie de ce cône à un ajutage (diamètre du trou) de 4,7 mm. Il faut alors mesurer le temps pour remplir le broc  jusqu’au trait que l’on devine sur la photo et qui correspond à 943 ml, soit un quart de gallon US.

Ce type d’essai est basé sur une  norme américaine. Pour notre coulis, le temps est compris entre 37 et 42 secondes

L’exsudation (ou décantation) :

Il s’agit de déterminer la stabilité du coulis. Il faut un coulis assez stable de manière à limiter le ressuage d’eau en surface, ce qui délaverait les parois de la tranchée, et augmenterait la consommation de coulis, donc de ciment. C’est un réglage très fin de la formule avec deux paramètres antinomiques : plus il est mis de bentonite, plus le coulis est stable mais alors plus le coulis est épais, et donc rempli moins bien les fissures des parois adjacentes. La valeur objectif est ici de 2 % maximum à 4 heures. ll faut donc remplir l’éprouvette de 1 litre (photo de gauche) et lire le nombre de cl d’eau en surface au bout de 4 heures.

La mesure du filtrat :

Il est prélevé du coulis au fond de la paroi creusée, avec une bouteille lestée, ouverte  en tirant sur le bouchon avec une ficelle. En effet, le sable et un peu d’argile se mélangent avec le coulis et changent les caractéristiques du coulis. Ici, la densité augmente à 1,28.

Pour mesurer la quantité de matière ajoutée, il faut alors mettre le coulis dans la cuve équipée de deux filtres (un papier et un autre métallique). Le gaz  chasse alors  l’eau du coulis. La pression exercée est de 0, 8 bars. Le temps d’attente est de 30 minutes. Il est mesuré :

  • le volume d’eau exsudée,
  • la hauteur du filtrat, communément appelé « cake ».

Le Cake (ou filtrat) :

Voici donc à droite, le cake fraîchement démoulé. Un cake de base sert d’étalon : il s’agit d’un essai avec du coulis en sortie de centrale. La hauteur de référence est de 19 mm.

Ici, avec un prélèvement en fond de fouille, la hauteur est de 39 mm, soit le double. A gauche de la photo, dans une autre zone géologiquement différente, la hauteur du cake est quasiment identique (38 mm)

En cas de forte augmentation de cette hauteur, dans des zones particulières, il faudrait alors remplacer le coulis de fond de paroi par un coulis fraîchement fabriqué. Ce qui n’a pas été le  cas ici, même dans les zones très sableuses. Ce qui prouve aussi la stabilité du coulis fabriqué.


Mes anecdotes :

Les caprices de la centrale liés à la météo. Un coup de froid,  la centrale rajoute 20 % de bentonite et hop, un bon coulis bien pâteux !

La chute d’un jeune homme dans la tranchée pleine …. sans frayeur car on flotte dans ce type de coulis !

La perte d’un pari (rare chez votre serviteur) pour une histoire de quart de gallon US ! La viscosité , c’est le temps que met le coulis pour remplir un volume de 943 ml, et non pas un litre. Et une tournée , patron !